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Jn  10  31-38

S. Augustin. (Traité 48.) Les Juifs ne purent supporter ces paroles : « Mon Père et moi nous sommes un, » et obéissant à leur dureté habituelle, ils coururent chercher des pierres pour les lui jeter : « Alors les Juifs prirent des pierres pour le lapider. » — S. Hil. (de la Trin., 7) Maintenant que le Seigneur est assis an plus haut des cieux, les hérétiques refusent encore d’obéir à ses paroles par le même sentiment d’incrédulité, et le poursuivent de leur haine sacrilège ; ils lancent contre lui leurs impiétés comme autant de pierres, et s’ils le pouvaient, ils le renverseraient de son trône pour l’attacher de nouveau à la croix.

Théophile. Mais le Sauveur voulant leur prouver que leur fureur contre lui n’a aucune raison d’être, leur rappelle les prodiges qu’il avait opérés : « J’ai fait devant vous beaucoup d’œuvres excellentes, » etc. — Alcuin. C’est-à-dire, les guérisons des infirmes, l’éclat de ma doctrine et de mes miracles, dont mon Père était le principe comme je vous l’ai déclaré, parce que j’ai toujours cherché sa gloire, pour laquelle donc de ces œuvres me lapidez-vous ? Ils sont forcés de reconnaître la multitude des bienfaits dont Jésus-Christ les a comblés, mais ils relèvent comme un blasphème ce qu’il a dit, qu’il était égal à son Père : « Les Juifs lui répondirent : Ce n’est pas pour aucune bonne œuvre que nous vous lapidons, mais à cause de votre blasphème, » etc. — S. Augustin. C’est la réponse qu’ils font à cette parole du Sauveur : « Mon Père et moi nous ne sommes qu’un. » Voici donc que les Juifs ont compris ce que n’ont pas compris les Ariens, car la colère des Juifs vint de ce qu’ils comprirent bien qu’il ne pouvait dire : Mon Père et moi nous ne sommes qu’un, qu’autant qu’il y avait égalité parfaite entre son Père et lui. — S. Hil. (de la Trin., 7) Le Juif dit : « Alors que vous êtes un homme ; » l’Arien : « Alors que vous êtes une créature, » et tous deux poursuivent : « Vous vous faites Dieu. » Les ariens, en effet, en font un Dieu d’une nature nouvelle et toute particulière, un Dieu d’un nouveau genre, ou plutôt un Dieu qui n’en est pas un, puisqu’ils prétendent qu’il n’est point Fils de Dieu par naissance, qu’il n’est point Dieu en vérité, et qu’il est tout simplement une créature plus excellente que les antres.

S. Chrys. (hom. 61.) Notre-Seigneur, loin de détruire l’opinion où étaient les Juifs, qu’il se disait égal à Dieu, cherche au contraire à la confirmer : « Jésus leur repartit : N’est-il pas écrit dans votre loi, » etc. — S. Augustin. C’est-à-dire, dans la loi qui vous a été donnée : « Je l’ai dit : Vous êtes des dieux. » Ce sont les paroles que Dieu adresse aux hommes dans les psaumes par son prophète. Le Sauveur comprend quelquefois sous le nom de loi, toutes les Ecritures ; en d’autres endroits il la distingue des écrits prophétiques : « A ces deux commandements se rattachent toute la loi et les prophètes. » (Mt 22) Quelquefois il divise les Ecritures en trois parties : « Il fallait que tout ce qui a été prédit de moi, dans la loi, dans les prophètes et dans les psaumes, fût accompli. » (Lc 14) Ici il comprend les psaumes sous le nom de loi, et voici son raisonnement : Si l’Ecriture appelle dieux ceux à qui la parole de Dieu a été adressée, et que l’Ecriture ne puisse être démentie, comment dites-vous à celui que le Père a sanctifié et envoyé dans le monde : Vous blasphémez, parce que j’ai dit : Je suis le Fils de Dieu ?

S. Hil. (de la Trin., 7) Le Sauveur, avant de démontrer que son Père et lui n’avaient qu’une seule et même nature, commence par repousser l’accusation aussi ridicule qu’outrageante, que les Juifs dirigeaient contre lui, qu’il se faisait Dieu, lorsqu’il était homme, car puisque ce nom était donné à de saints personnages, et que la parole de Dieu appuyait de son autorité irréfragable l’attribution faite de ce nom à de simples mortels, ce n’est donc point un crime pour lui de se faire Dieu, quand il n’aurait été qu’un homme, puisque la loi elle-même appelle Dieu ceux qui ne sont que des hommes. Et si les autres hommes peuvent prendre ce nom sans aucune usurpation sacrilège, à plus forte raison celui que le Père a sanctifié peut-il sans usurpation prendre ce nom et se dire le Fils de Dieu, puisqu’il surpasse tous les autres par la sanctification qu’il a reçue comme Fils, d’après ces paroles de saint Paul : « Qu’il était prédestiné Fils de Dieu en puissance, selon l’esprit de sanctification, » (Rm 1, 4) car toute cette réponse du Sauveur a trait à son humanité, et tend à établir que le Fils de Dieu est aussi le Fils de l’homme.

S. Augustin. Ou bien encore, le Père l’a sanctifié, c’est-à-dire, lui a donné d’être saint eu l’engendrant, parce qu’il l’a engendré dans la plénitude de la sainteté. Or, si la parole de Dieu, adressée aux hommes, leur a donné le nom de dieux, comment le Verbe de Dieu ne serait-il pas Dieu lui-même ? Et si les hommes, en participant au Verbe de Dieu, deviennent eux-mêmes des dieux, comment le Verbe qui fait entrer en participation de lui-même, ne serait-il pas Dieu ? — Théophile. Ou bien, il l’a sanctifié, c’est-à-dire, il a ordonné qu’il serait offert en sacrifice pour le monde, ce qui prouve qu’il n’est pas Dieu comme les autres hommes, car sauver le monde est une œuvre toute divine et bien au-dessus d’un homme déifié par la grâce.

S. Chrys. (hom. 61.) Ou bien encore, Notre-Seigneur s’exprime d’abord en termes plus humbles de lui-même, pour faire recevoir plus facilement ses paroles, et s’élever ensuite à de plus hautes considérations : « Si je ne fais pas les œuvres de mon Père, ne me croyez point. » Il prouve ainsi qu’il n’est en rien inférieur à son Père : et comme il était impossible de voir sa nature divine, il prouve que la ressemblance est l’identité des œuvres, la parfaite égalité de puissance. — S. Hil. (de la Trin., 7) Comment trouver place ici à une simple adoption, à un nom concédé par indulgence, pour nier qu’il soit le Fils de Dieu par nature, alors que les œuvres de la puissance du Père prouvent évidemment qu’il est le Fils de Dieu ? La créature ne peut prétendre ni à l’égalité ni à la ressemblance avec Dieu, et aucune nature créée ne peut lui être comparée en puissance. Or, le Fils déclare qu’il accomplit non pas ses œuvres, mais les œuvres de son Père, pour ne pas détruire par l’éclat de ses œuvres la vérité de sa naissance. Et comme le mystère de son incarnation, dans le sein de Marie, découvrait surtout en lui le Fils de l’homme et non le Fils de Dieu, il appuie notre foi sur ses œuvres : « Mais si je les fais, quand bien même vous ne voudriez pas me croire, croyez aux œuvres. » Pourquoi, en effet, le mystère de sa naissance humaine, de son humanité, nous empêcherait-il d’admettre sa naissance divine, puisque c’est sous le voile de l’humanité que la nature divine accomplit toutes ses œuvres ? Mais quelle est la vérité qu’il veut faire ressortir des œuvres du Père qu’il accomplit ? « Afin que vous connaissiez et que vous croyiez que mon Père est en moi, et moi dans mon Père, » c’est-à-dire que je suis le Fils de Dieu, ou en d’autres termes, que mon Père et moi ne sommes qu’un. — S. Augustin. (Traité 48 sur S. Jean.) Le Fils de Dieu ne dit pas : Mon Père est en moi. et moi en lui, dans le sens que les hommes le peuvent dire ; car si nos pensées sont bonnes, nous sommes en Dieu, et si notre vie est sainte, Dieu est en nous. Lorsque nous participons à sa grâce et que nous recevons sa lumière, nous sommes en lui, et lui en nous. Mais pour le Fils unique de Dieu, il est dans le Père, et le Père est en lui, comme un égal est dans celui qui lui est égal.

Saint Thomas d’Aquin, Glose continue des Évangiles. La chaîne d’or, ouvrage rédigé de 1263 à 1264.
Trad. par l’abbé J.-M. Peronne, Librairie Louis Vivès, 1868.

 

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