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VINGTIÈME CONSIDÉRATION
« La sagesse de ce siècle est folie devant Dieu »
(2 Corinthiens 3, 19)
Le vénérable Jean d’Avila (S. Jean d’Avila, Trattati del SS. Sacramento dell’Eucharistia, tr. 9-10, Rome, 1608, pp. 138, 161; Trattato spirituale sopra il verso « Audi filia », c. 48, Rome, 1610, p ; 147) aurait voulu ouvrir dans le monde deux prisons : une pour renfermer ceux qui ne croient pas, et l’autre, ceux qui croient et qui vivent dans le péché, loin de Dieu ; et, ajoutait-il, c’est une prison de fous qui convient à ces derniers. Les malheureux ! Ils en viennent dans les excès de leur misère et de leur infortune, à se regarder comme des sages et prudents, eux les plus vains et les plus insensés de tous les hommes ! Et pour comble de désolation, « leur nombre, dit l’Ecclésiaste, est infini » (Ecclésisate 1, 15). Leur folie, c’est pour celui-ci les honneurs, pour celui-là les plaisirs, pour un autre les misérables biens de la terre ; avec cela, ils ont l’audace de traiter de folie la conduite des Saints qui foulent aux pieds les avantages de ce monde pour conquérir le salut éternel et Dieu, le vrai Bien. Ainsi, c’est folie à leurs yeux que d’embrasser les mépris et de pardonner les injures ; folie encore de se priver des plaisirs des sens pour s’adonner à la mortification ; folie de renoncer aux honneurs et richesses, folie d’aimer la solitude, la vie humble et cachée. Hélas ! Ils ne veulent pas entendre la parole du Seigneur, proclament leur sagesse une vraie folie : « La sagesse de ce siècle est folie devant Dieu » (1 Corinthiens 3, 19).
Ah ! Un jour viendra bien où ils confesseront hautement leur folie. Mais quand ? Alors qu’il n’y aura plus de remède. « Insensés que nous étions, s’écrieront-ils dans leur désespoir, nous estimions leur vie une folie et leur fin sans honneur » (Sagesse 5, 4). Mais, nous le voyons à présent, la folie n’était pas de leur côté. « Car voilà qu’ils sont comptés parmi les fils de Dieu et que leur sort est au milieu des saints » (Sagesse 5, 5). Éternelle sera leur gloire et leur bonheur n’aura jamais de fin. Pour nous, nous voici relégués parmi les esclaves de Satan, condamnés à brûler durant toute l’éternité dans cet abîme de tourments. « Nous avons donc erré hors du chemin de la vérité et la lumière de la justice n’a pas lui sur nous » (Sagesse 5, 6). Oui, nous avons voulu fermer les yeux à la lumière de Dieu et nous nous sommes égarés. Hélas ! Pour comble d’infortune, notre erreur est sans remède et jamais nous n’en reviendrons tant que Dieu sera Dieu.
Quelle folie donc de perdre la grâce de Dieu, et cela pour un vil intérêt, pour un peu de fumée, pour un plaisir qui passe si vite ! Que ne fait pas un sujet pour gagner les bonnes grâces de son prince ? Et voilà que, pour une misérable satisfaction, on va perdre le souverain Bien, Dieu lui-même, perdre le ciel, perdre encore la paix ici-bas en livrant son âme au péché qui la déchirera de continuels remords et se condamner ainsi de gaieté de coeur à un malheur éternel ! Prendriez-vous ce plaisir défendu, s’il fallait en retour avoir une main brûlée ou seulement passer une année dans un obscur cachot ? Commettriez-vous ce péché, s’il devait vous en coûter cent écus ? Et vous croyez, vous savez qu’en péchant vous perdez le ciel et Dieu et que vous vous condamnez pour toujours à l’enfer ; et néanmoins vous péchez !
O Dieu de mon âme, quel serait maintenant mon sort, si vous ne m’aviez traité avec tant de miséricorde ? Hélas ! Je me trouverais en enfer, dans la compagnie de tous les insensés, auxquels je n’ai que trop ressemblé ! Je vous remercie, Seigneur, de votre bonté et je vous prie de ne pas ma laisser dans mon aveuglement. Je méritais que votre lumière me fût retirée pour toujours ; mais je vois que votre grâce ne m’a pas encore abandonnée. Je sens qu’elle m’appelle avec tendresse et qu’elle me presse de vous demander pardon et d’espérer de vous en de grandes choses malgré la grandeur de mes offenses. Oui, mon Sauveur, je l’espère, vous m’accueillerez encore comme votre enfant. « Il est vrai, ô mon Père, que je ne mérite plus d’être appelé votre fils, moi qui ai péché contre le ciel et sous vos yeux » (Luc 15, 18). Mais je sais que vous allez à la recherche des brebis égarées et que vous vous faites un bonheur d’accorder à l’enfant prodigue le baiser de paix. O mon Père bien-aimé, je me repens de vous avoir offensé, je me jette à vos pieds et je les tiens embrassés. « Non, je ne vous quitterai pas que vous ne m’ayez béni et pardonné » (Genèse 32, 26). Bénissez-moi donc, ô mon Père, et que, par votre bénédiction, je conçoive une grande douleur de mes péchés et un grand amour pour vous. Je vous aime, ô mon Père, de tout mon coeur ; ne permettez pas que je vous quitte de nouveau. Ôtez moi tout, mais ne m’ôtez pas votre amour.
O Marie, si Dieu est mon Père, vous êtes ma Mère, bénissez-moi donc, vous aussi. Et puisque je ne mérite pas d’être votre enfant, au moins acceptez-moi pour votre serviteur ; mais faites de moi un serviteur qui vous aime toujours avec tendresse et qui se confie toujours en votre protection.
Pauvres pécheurs ! Ils se fatiguent, ils s’épuisent pour acquérir les sciences mondaines, c’est-à-dire l’art d’amasser les biens de cette vie qui doit sitôt finir ; et les biens de l’autre vie, de celle qui ne finira jamais, ils les regardent avec indifférence. Que dis-je ? Ils en viennent, dans leur stupidité, à perdre le sens commun et à se rendre semblables aux animaux sans raison. En effet, à la façon des brutes, ils vivent sans considérer ce qui est bien et ce qui est mal ; mais n’ayant d’autre loi que l’instinct brutal de leurs sens, ils s’attachent à ce qui flatte leur chair pour le moment et ils ne songent aucunement à ce qu’ils perdent et à la ruine éternelle qu’ils se préparent. Évidemment ce n’est pas là se conduire en homme, mais comme un animal sans raison, ainsi que l’explique saint Jean Chrysostome (S. Jean Chrysostome, Homélie 23 sur la Genèse, n. 3, PG 53, 191). « A nos yeux, dit-il, un homme, c’est celui qui conserve intact le trait distinctif de l’homme. Or ce trait n’est autre que la raison. » Être homme, c’est être raisonnable et par conséquent c’est agir, non suivant l’attrait des sens, mais d’après la raison. Si Dieu donnait la raison à un animal et que celui-ci dans sa conduite s’inspirât des lumières de la raison, on dirait de cet animal qu’il agit en homme ; par contre, on doit donc dire qu’un homme se conduit en animal, quand il refuse d’écouter sa raison pour obéir aux sens.
« Plût à Dieu qu’ils fussent sages, qu’ils comprissent et qu’ils songeassent à leur fins dernières » (Deutéronome 32, 29) ! L’homme prudent et qui se conduit selon les règles de la raison se préoccupe de l’avenir, c’est-à-dire de ce qui l’attend au terme de ses jours ; il a donc devant les yeux la mort, le jugement et ce qui doit les suivre : le ciel ou l’enfer. Oh ! Qu’un paysan, qui se sauve, l’emporte en sagesse sur un monarque qui se damne ! « Mieux vaut un enfant pauvre et sage qu’un roi vieux et insensé qui ne sait pas prévoir pour l’avenir » (Ecclésiaste 4, 13). O Dieu ! Ne regarderait-on pas comme un insensé celui qui s’exposerait à perdre toute sa fortune pour gagner sur-le-champ une pièce de monnaie ? Et celui qui pour un plaisir d’un instant perd son âme et l’expose à une perte éternelle, on ne devra pas le regarder comme un insensé ! Ce qui cause la ruine et la damnation de tant d’âmes, c’est qu’elles ont uniquement en vue les biens et les maux de la vie présente, sans songer aux biens et maux éternels.
Assurément Dieu ne nous a pas placés ici-bas, pour que nous nous procurions richesses, honneurs, plaisirs des sens, mais bien que nous méritions la vie éternelle. « Vous avez pour fin, dit l’Apôtre, la vie éternelle » (Romains 6, 22). Par conséquent, parvenir à cette fin, telle doit être notre unique sollicitude. « Car une seule chose est nécessaire » (Luc 10, 42). Or c’est surtout cette fin que les pécheurs mettent de côté : ils ne pensent qu’au présent, ils s’acheminent vers la mort, ils se trouvent à la veille d’entrer dans l’éternité, sans même savoir où ils vont. « Que diriez-vous, dit saint Augustin (S. Augustin, Sur le Psaume 31, sermon 2, n. 4, PL 36, 259-260 (Vivès, t. 12, p. 7) d’un pilote à qui l’on demanderait où il va, et qui répondrait : Je n’en sais rien ? Est-ce que tout le monde ne dirait pas de cet homme qu’il conduit le navire à sa perte, à un naufrage assuré ? Ainsi, conclut le saint Docteur, en est-il de celui qui court hors du vrai chemin. » Et ainsi en est-il des sages du monde. Ils savent bien s’enrichir, se divertir, s’avancer dans les honneurs ; mais ils ne savent pas sauver leur âme. Ce fut un sage que le mauvais riche, si habile à grossir ses trésors ; « mais il mourut et fut enseveli dans l’enfer » (Luc 16, 22). Ce fut un sage qu’Alexandre le Grand, étendant son sceptre sur tant de royaumes ; mais, à quelques années de là, il mourait et se damnait pour toujours. Ce fut un sage que Henri VIII, assez heureux pour se maintenir sur le trône, malgré sa révolte contre l’Église ; mais à la fin il vit lui-même que c’en était fait pour son âme et il s’écriait : « Nous avons tout perdu ! » (N. Anders, De origine ac progressu schismatis anglicani, lib. 1, Rome, 1586, p. 244). Aussi, que de malheureux gémissent et s’écrient maintenant en enfer : « De quoi nous ont servi l’orgueil et l’ostentation des richesses ? Toutes ces choses ont passé comme une ombre » (Sagesse 5, 8) ; et de toutes ces choses, ainsi évanouies, il ne nous reste que des larmes et des peines éternelles.
« Devant l’homme est la vie ou la mort… Ce qui lui plaira, lui sera donné » (Ecclésiaste 15, 18). Oui, chrétien, mon frère, devant vous sont placées en ce moment la vie et la mort ; renoncer aux plaisirs défendus, c’est mériter la vie éternelle ; vous accorder ces plaisirs, c’est encourir la mort éternelle. Qu’en dites-vous ? Que choisissez -vous ? Ah ! Choisissez en homme et non pas en être sans raison, choisissez en chrétien qui a la foi et qui dit : « Que sert à l’homme de gagner le monde entier, s’il perd son âme » (Matthieu 16, 26) ?
Ah ! Mon Dieu, vous m’avez donné la raison, vous m’avez donné la lumière de la foi ; et moi, par le passé, je me suis conduit en être sans raison, puisque j’ai perdu votre grâce pour de misérables plaisirs sensuels. Les plaisirs se sont évanouis comme un souffle léger et maintenant il ne me reste que des remords de conscience et un compte terrible à présenter devant votre tribunal. Ah ! Seigneur, « n’entrez pas en jugement avec votre serviteur » (Psaume 142, 2), et ne me jugez pas selon mes iniquités ; mais traitez-moi selon votre miséricorde. Éclairez-moi, donnez-moi une grande douleur de vous avoir offensé ; et pardonnez-moi. « J’ai erré comme une brebis qui s’est perdue ; cherchez votre serviteur » (Psaume 118, 176). Je suis cette pauvre brebis perdue ; si vous ne me cherchez pas, je suis perdu sans ressource. Par le sang que vous avez répandu pour mon amour, ayez pitié de moi. O mon souverain Bien, je me repens de vous avoir quitté et d’avoir de gaieté de coeur renoncé à votre grâce. Je voudrais en mourir de douleur : vous-même donnez-moi la plus grande douleur. Faites qu’un jour j’aille au ciel chanter vos miséricordes.
O Marie, ma Mère, vous êtes mon refuge, priez Jésus pour moi ; priez-le qu’il m’accorde mon pardon et qu’il me donne la sainte persévérance.
Comprenons-le bien, les vrais sages sont ceux qui savent acquérir la grâce de Dieu et mériter le ciel. Prions donc continuellement le Seigneur qu’il nous donne la science des saints. Car il la donne à ceux qui lui en font la demande. « Dieu lui a donné la science des saints, dit le livre de la Sagesse » (Sagesse 10, 10). Oh ! La belle science que de savoir aimer Dieu et sauver son âme, c’est-à-dire de prendre le chemin du salut éternel et les moyens d’y parvenir ! De toutes les études la plus nécessaire c’est celle qui nous apprend à sauver notre âme. En vain aurions-nous toutes les autres connaissances, si nous ne savons pas faire notre salut, tout ne nous servira de rien et éternellement nous serons malheureux. Au contraire, si nous savons aimer Dieu, encore que nous fussions ignorants en tout le reste, éternellement nous serons heureux. O mon Dieu, dit saint Augustin (S. Augustin, Les Confessions, liv. 5, ch. 4, n. 7, PL 32, 708 : « Est-il possible que, Seigneur, Dieu de vérité, quiconque possède ces connaissances te plaise déjà ! Car il est malheureux, l’homme qui connaît toutes ces vérités mais ne te connaît pas ; bienheureux au contraire qui te connaît, même s’il ne les connaît pas » (BA, t. 14, trad. E. Tréhorel et G. Bouissou, p. 473), bienheureux celui qui vous connaît, ignorât-il toutes les autres choses. Un jour le frère Gilles disait à saint Bonaventure (Marc de Lisbonne, Chroniques de l’Ordre des Frères Mineurs, liv. 7, ch. 14, t. 1, Venise, 1582, p. 131) : Que vous êtes heureux, Père Bonaventure, de savoir tant de choses. Moi, pauvre ignorant, je ne sais rien. Aussi vous pouvez devenir plus saint que moi. -- Écoutez, mon frère, lui répondit le saint, si une pauvre vieille femme, toute ignorante, sait aimer Dieu plus que moi, elle sera plus sainte que moi. -- Sur quoi le frère Gilles se mit à crier de toutes ses forces : Écoutez, vieille femme, écoutez : si vous aimez Dieu, vous pouvez devenir plus sainte que le Père Bonaventure.
« Les ignorants se lèvent, dit saint Augustin, et ils ravissent le ciel » (S. Augustin, Les Confession, liv. 8, ch. 8, n. 19, PL 32, 757 : « Alors, au milieu de ce grand combat qui se livrait dans ma maison intérieure et que j’avais violemment engagé dans mon âme… je me jette sur Alypius, je crie : Quoi ! Nous supportons cela ! Quoi, tu as entendu ? Des ignorants se dressent, ils enlèvent le ciel, et nous, avec notre science sans coeur, voilà où nous roulons ! Dans la chair et le sang ! » (BA, trad. E. Tréhorel et G. Bouissou, p. 47). Que de pauvres gens se sauvent, qui ne savent pas lire, mais qui savent aimer Dieu ! Et combien de savants du monde, qui se damnent misérablement ! Ce ne sont pas ceux-ci, mais les autres qu’il faut tenir pour de vrais savants. Oh ! Quel savant qu’un saint Pascal, un saint Félix, capucin, un saint Jean de Dieu, si étranger pourtant aux sciences humaines ! Quels savants encore que tous ces hommes qui, renonçant au monde, sont allés s’enfermer dans les cloîtres ou vivre dans les déserts, un saint Benoît, un saint François d’Assise, un saint Louis de Toulouse, qui renonça à un trône ! Quels savants que ces innombrables martyrs, ces légions de vierges, qui refusèrent les plus brillantes alliances, afin d’aller à la mort pour Jésus Christ ! Les mondains eux-mêmes le reconnaissent bien. Aussi ne manquent-ils pas de dire, en voyant une personne se donner à Dieu : Elle est heureuse, celle-là ! Elle comprend bien les choses et elle sauve son âme. Bref, ceux qui quittent les biens de ce monde pour se vouer au service de Dieu, ne les appelle-t-ion pas des hommes désabusés ? Par conséquent, ceux qui abandonnent Dieu pour les biens du monde, que sont-ils, sinon des dupes ?
Vous, mon frère, desquels voulez-vous être ? Pour éclairer votre choix, saint Jean Chrysostome vous conseille de vous rendre dans un cimetière. « Allons, dit-il, auprès des tombeaux » (S. Jean Chrysostome, Homélie 76 sur Matthieu, n. 5, PG 58, 700-701 : « Allons ensemble aux tombeaux des morts. Venez me montrer votre père ou votre femme. Faites-m’y voir ceux qui étaient ici revêtus de pourpre… Je ne vois maintenant que des os secs et pourris, que des vers, que des araignées, qu’un peu de poussière et de pourriture. Toutes ces grandeurs se sont évanouies comme un ombre, comme un songe, comme une fable et comme un tableau, si l’on peut dire toutefois qu’il s’y trouve même la réalité d’une image » (JEA, t. 7, p. 595). L’excellente école en effet qu’un cimetière pour connaître la vanité des biens de ce monde et pour apprendre la science des saints ! Dites-moi, ajoute saint Jean Chrysostome, pouvez-vous y discerner encore celui qui a été prince, noble, savant ? Pour moi, je n’aperçois rien que de la pourriture, des ossements et des vers. Tout se réduit donc à une vaine apparence, un rêve, une ombre fugitive. Oui, toutes les choses de ce monde passeront vite comme une pièce de théâtre, toutes s’évanouiront comme un songe et une ombre. Mais, pour devenir un vrai sage, il ne suffit pas, mon frère, de connaître l’importance de votre fin, il faut encore prendre les moyens de l’atteindre. Tous voudraient se sauver et se sanctifier, mais, faute d’en prendre les moyens, combien ne se sanctifient pas et sa damnent ! Il faut fuir les occasions dangereuses, fréquenter les sacrements, faire oraison, et, avant tout, graver profondément dans son coeur ces maximes du saint Évangile : « Que sert à l’homme de gagner le monde entier, s’il perd son âme » (Matthieu 16, 26) ! « Celui qui aime son âme, la perdra » (Jean 12, 25), c’est-à-dire qu’il faut même sacrifier sa vie pour le salut de son âme. « Celui qui veut venir après moi, qu’il renonce à lui-même » (Matthieu 16, 24). Pour suivre Jésus Christ nous devons refuser à l’amour-propre les satisfactions qu’il réclame. La vie est dans sa volonté, c’est-à-dire, votre salut consiste à faire la volonté de Dieu. Il importe que nous ayons sans cesse devant les yeux ces maximes et autres semblables.
O Père de miséricorde ! Jetez les yeux sur toutes mes misères et ayez pitié de moi ; éclairez-moi et faites-moi bien connaître ma folie du passé, afin que je la déplore, et votre Bonté infinie, afin que je l’aime. Mon Jésus, « ne livrez pas aux bêtes infernales les âmes qui vous louent » (Psaume 73, 19). O vous, qui avez versé votre sang pour me sauver, ne permettez pas que je redevienne encore l’esclave du démon. Je me repens, ô souverain Bien, de vous avoir abandonné ; maudits soient tous ces instants où, par ma faute, j’ai livré ma volonté au péché. Maintenant je l’unis à la vôtre, à cette sainte volonté qui désire uniquement mon bien. Père Éternel, au nom des mérites de Jésus Christ, donnez-moi la force d’accomplir tout ce qui vous est agréable. Faites que je meure plutôt que de résister encore à vos divines volontés. Aidez-moi de votre grâce, afin que je place en vous seul tout mon amour et que j’ôte de mon coeur toutes les affections qui ne tendent pas à vous. Je vous aime, ô Dieu de mon âme ; je vous aime par dessus toute chose ; et j’espère de vous tous les biens, le pardon de mes péchés, la persévérance dans votre amour, et enfin le ciel pour vous aimer éternellement.
O Marie, demandez pour moi toutes les autres grâces. Votre divin Fils ne vous refuse rien. O mon espérance, je me confie en vous.
Saint Alphonse de Liguori, Préparation à la mort, 1758. Texte numérisé par Jean-Marie W. (jesusmarie.com).